En ce mois d’août, les touristes sont partie intégrante des paysages de montagne! Parler anglais est chose commune, tellement l’Europe entière (tout comme nous) vient jouer des crampons et du piolet sur ces belles faces des Ecrins!

Nous voilà donc en ce tout début de mois estival à Ailefroide, dernière bourgade de la vallée de Vallouise, avant les départs pour les refuges.
C’est rapidement, que le choix de la course sera fait, l’envie d’être la haut est plus forte que de comparer tel ou tel itinéraire de même difficulté.
Avec tous les préparatifs, nous n’avons même pas le temps de nous confronter aux magnifiques blocs qui vous narguent du bord de la route! Nous y ferons quand même un tour plus tard, et il s’avérera que, même le bloc ici, c’est bien!
Quelques emplettes et locations de matériel et c’est parti! Le parking du Pré de Madame Carle est blindé, les dernières traces de goudron avant la marche à pied.
La montée au refuge du Glacier Blanc, en plein cagnard et avec tout le barda sur le dos, c’est un bel échauffement pour le lendemain! et c’est déjà là, même entourés de randonneurs du dimanche, que l’on est frappés par la beauté de ces vallées fleuries et de ces monts enneigés.
L’arrivée au refuge, vers 18h, se fait sans encombre. Cette première journée, est l’occasion de faire ses marques, se réhabituer à la marche en altitude et essayer de réveiller un peu ses muscles, avec le manque d’entraînement dont nous souffrons.


Le temps de prendre une photo avec Julien, d’attendre les autres, et il est 19h; et déjà la journée au refuge se termine. Nous mangeons les pires pâtes jamais préparées par l’homme (ça manquait d’eau), et nous précipitons au lit.
Dans notre chambre, une vingtaine d’autres alpinistes s’entassent, et vu l’horaire de départ, il n’est pas étonnant d’en voir certains, déjà endormis a 20h!
Levé: 3h du matin. Le temps d’avaler un bout de barre de céréales, de chausser, et nous nous enfonçons déjà dans l’épaisse nuit de la montagne. Plusieurs cordées sont devant nous et plusieurs sont derrières, en pleine nuit, les caravanes de frontales les unes après les autres, se voient de loin. C’est là aussi, une frappante réalité, la beauté de cet endroit n’est pas restée secrète très longtemps, et avec la démocratisation des sports de montagne, il faut savoir cohabiter avec tous les autres alpinistes venus faire les même courses que nous.

Le froid, se fait vite oublier tellement la marche est rude et le souffle raccourci par l’altitude. Nous sommes rapidement en nage, et c’est en t-shirt que nous allons terminer la partie sèche de la course. Vers 2800 mètres nous pouvons éteindre les frontales, nous habiller chaudement et sortir les crampons. Nous ne les quitterons plus pour les prochains 500 metres de dénivelés a parcourir.
Première belle étape et première pause de la course, le Col du Monêtier est à 3200 mètres d’altitude. Nous apercevons pour la première fois de la journée les rayons du soleil, il est 7h30 du matin, l’horaire est respectée nous sommes contents de nous. Les sourires sont sur les visages car le paysage est magnifique. Le dôme des Ecrins est visible, l’Italie aussi, nos yeux profitent donc de ce court laps de temps pour imprimer ces grands espaces et mémoriser ces belles images.

La pause finie et le temps de traverser un dernier glacier et nous contemplons enfin la difficulté majeure de la course, un amas rocheux de 200 mètres a gravir. Heureusement, le rocher, c’est notre rayon… Ce qui n’était pas forcément le cas du couple d’anglais devant nous. Ces derniers protégeant chacuns de leur mouvements par multiples coinceurs et autres artifices que nous avons préféré laisser dans le coffre de notre bolide pour nous éviter des kilos superflus dans les sacs.
Les quelques longueurs « difficiles » (passages en 4b) sont avalées rapidement et place maintenant à la corde tendue, encordés a 10 mètres l’un de l’autre, en cordées de deux. Nous gravissons les dernières dizaines de mètres qui nous séparent du sommet. Mais ici, la facilité de l’escalade est à compenser par la difficulté de garder un rythme de progression constant. Tellement nous avons du mal à alimenter nos poumons en oxygène pour un tel effort.
En effet, l’altitude nous rattrape, et rend notre ascension plus compliquée.
C’est donc « sur les genoux » que nous nous sommes hissés au sommet.
3664 mètres, Montagne des Agneaux. Nous profitons de l’instant.
Ce sentiment d’accomplissement qu’éprouve chaque grimpeur en atteignant son but, est à savourer langoureusement.
Nous apercevons même, maintenant que nous disposons d’un panorama idéal, le massif de haute savoie, et son gardien, le Mont Blanc. Comme une suite logique, il se présente a nous, et c’est presque un défi qui se lie à l’intérieur de moi, peut être un jour, je serai là haut.
Le temps de reprendre nos esprit, il est maintenant 9h30 et c’est la partie la plus fatiguante et la moins intéréssante de la course qu’il nous reste à faire: la descente.
Il était temps, l’altitude me donnait des maux de tetes, j’aurai vraiment du m’acclimater différemment ou plus m’entrainer car c’est à ce moment là que je constate mon manque de conditions physiques, pour un tel effort.

Le même chemin est à refaire en sens inverse, et cette fois jusqu’au parking, pas de nuit au refuge pour se reposer!
A 14h30 nous y sommes. Ereintés, les genoux en feu, complètement cramés par le soleil hargneux de la haute montagne et par le misérable oubli de la crème solaire, nous lâchons sacs et piolets pour un moment de repos bien mérité. Cette belle mission nous laissera pleins de beaux souvenirs, mais maintenant que nous sommes en bas. La seule chose à laquelle nous pensons, c’est manger, et vite aller dormir, car cela fait déjà près de 12h que nous sommes levés et actifs! En n’ayant mangé que quelques barres de céréales.

Rien de mieux qu’une belle journée d’alpinisme pour retrouver l’appétit…

Texte et images : Matthieu Reus – août 2011.